lundi 1 octobre 2012

Décore-Man...

J'ai de la compétition dans le domaine du changement de décor. X-Man vient en effet de gagner une victoire dans ce département depuis jeudi dernier.

(Non, X-Man n'a pas arraché les murs de stucco ce week-end ni changé la toilette jaune laitte et encore moins posé du plancher de bois au sous-sol...)

X-Man s'est plutôt fait imposer un changement de décor auquel il ne s'attendait pas. Un changement auquel il n'avait pas pensé, un changement qui ne lui plaît pas du tout. (Moi qui rêve de changements drastiques, en voilà un que je suis heureuse de ne pas avoir gagné...)

En effet, jeudi après-midi, X-Man a dû revenir plus tôt de sa tournée des librairies en Abitibi pour une réunion convoquée dans un hôtel par le grand patron de la boîte où il travaille depuis six ans. Dans cette salle, se retrouvaient les 43 autres employés qui, eux aussi, avaient dû écourter leur besogne pour une réunion au sommet. Vous me voyez venir et il m'est difficile de créer un effet de surprise avec une telle annonce, mais la compagnie fermera ses portes le 21 décembre prochain.

Beau cadeau de Noël, n'est-ce pas? 44 familles se retrouvent les mains remplies d'un emballage amer avec lequel ils devront recouvrir leurs cadeaux cette année. Si cadeaux il y a, hein. Parce qu'on s'entend que sur les 44 employés, plusieurs d'entre eux travaillaient pour cette boîte depuis nombre d'années (la maison de distribution a fêté ses 30 ans l'an dernier) et n'ont plus l'âge "assez jeune" pour se retrouver un emploi avec de telles conditions salariales avantageuses et gagnées avec tant d'énergie... Certains d'entre eux se dirigeaient plutôt vers une retraite dans quelques années... ils ne se dirigeaient pas vers un bureau de chômage...

X-Man, de son côté, a la "chance" de n'avoir que 38 ans et tout son avenir professionnel devant lui. Il a beaucoup d'expérience, sa réputation dans le milieu littéraire est très bien établie, les clients le remercient avec sincérité pour son travail et je dis cela en toute objectivité. (Avant d'être amoureuse de cet homme, j'ai travaillé avec lui... il était mon représentant préféré. Et il l'est encore!) X-Man a la chance d'avoir encore beaucoup d'ambition, de ne pas être trop blasé et d'avoir encore plusieurs objectifs à atteindre pour être heureux dans son métier.

Et c'est là que la contradiction s'affiche. X-Man AIMAIT son boulot, ses clients, les éditeurs qu'il représentait. X-Man n'avait PAS envie de changer d'employeur, il avait cette stabilité non-contraignante qui lui offrait un horaire avec lequel il composait très bien. X-Man revenait le soir, fatigué certes, mais jamais en colère ou découragé de travailler. Il se levait chaque matin vers 5h00 pour terminer ses dossiers, remplir ses commandes et il s'évadait du quotidien grâce à la route qu'il parcourait avec ses clients éparpillés un peu partout dans notre joli Québec.

Bref, X-Man avait trouvé sa niche et voilà que les propriétaires décident de la fermer pour des histoires de situation économique difficile, de chutes des profits, de recentralisation des budgets, tutti quanti. (C'est-tu beau du latin...) Il y a aussi le printemps érable qui a été cité dans les raisons de cette fermeture annoncée. En effet, le réseau scolaire ayant été inactif au niveau des achats pendant plusieurs semaines, ce fut la débandade pour les éditeurs scolaires (une deuxième boîte que possédait les patrons de la compagnie où travaille X-Man). Je ne me lancerai pas dans les expliquations justificatives de cette fermeture parce que je ne suis pas certaine d'avoir tout compris... mais je sais que c'est une décision qui me plonge dans un état de tristesse culturelle et familiale, bon.

X-Man avait un congé "payé" vendredi pour digérer la nouvelle. (Quelle générosité.) Il s'est donc levé plus tard ce matin-là après avoir quand même bien dormi, la route du retour de l'Abitibi aidant... Je m'attendais à retrouver un X-Man dévasté, les traits tirés avec un moral destructeur, mais non. X-Man était heureux de retrouver sa famille (après une semaine au loin et l'autre semaine d'avant à parcourir plusieurs lancements les soirs) et de pouvoir se reposer sans se sentir coupable. (Tiens tiens, je suis jalouse là!) X-Man a bien sûr commencé à réfléchir à voix haute à propos de ce "licenciement collectif" et il réfléchit encore. La cassette est loin d'être usée et je compatis avec ce genre de ver d'esprit... il ne pense qu'à cette situation inattendue, qu'à ce qui se passera dans les prochaines heures, les prochaines semaines, les prochains mois et les prochaines années. Où travaillera-t-il en janvier? Aura-t-il encore d'aussi bonnes conditions? D'aussi bonnes assurances? Une équipe de travail aussi appréciable et appréciée? Un patron aussi conciliant quant aux problèmes médicaux de X-Boy?

Les réflexions, questionnements, remises en perspective ont composé nos repas du week-end. Nous avons mangé des suppositions (c'est mieux que des suppositoires! hahahah), ravalé des réalités, tenté de digérer plusieurs angoisses financières à venir.

***

Ce qui me laisse un goût suramer dans la bouche face à cette mauvaise nouvelle? Le sentiment que, aaaah, ça ne pourra jamais être simple chez nous. Alors que l'épilepsie de X-Boy se contrôle, qu'il fait des progrès grâce à ses périodes à l'école, que je commence à penser à accepter de me reposer un peu les après-midis afin de me "refaire" une personnalité et une santé, BANG. Une autre tuile nous tombe sur la tête.

Ce n'est pas la pire des tuiles. Personne n'a le cancer, X-Man se retrouvera rapidement un boulot et je pourrai continuer à écrire parce que mon portable est payé (merci les assurances post-inondations...)... Mais tout de même, j'aurais aimé qu'on nous laisse les neurones du stress un peu tranquilles. Qu'on puisse jouer dans les feuilles d'automne sans se demander si elles pourraient nous rapporter de l'argent en les vendant en Afrique (ben quoi, y'ont pas d'automne là-bas...).

Ce n'est pas la pire des tuiles. X-Man n'a pas pesté contre l'humanité (contrairement à d'habitude lorsque X-Boy choppe un virus, par exemple), n'a pas voulu tout sacrer là et déménager au Népal afin de vivre loin de la surtechnologisation du livre-papier... X-Man voit cette "rupture" comme un vent de changement.

- X-Mom, tu trippes sur les vents d'automne et sur les feuilles qui changent de couleur? C'est un peu la même chose, non? Je vais trouver un autre arbre...

- Poète de saison, X-Man?

On a rigolé.

Puis, j'ai versé plusieurs larmes... Car ce qui me chamboule dans toute cette histoire, c'est que notre passion commune pour la bande dessinée, les livres jeunesse et les livres de recettes ne sera plus la même... Tous ces soirs où nous regardons les feuillets des livres à paraître, les listes de lectures que l'on se fait, les envois postaux que je remplis avec affection afin de l'aider dans sa paperasse... Attendre avec impatience les vendredis soirs alors que X-Man débarque avec une boîte de livres neufs à "lire" avant de les donner aux libraires et/ou de les garder pour notre collection et pour X-Boy... Ces vendredis-comme-des-soirs-de-Noël...

Je prenais ce privilège pour acquis et je m'en aperçois. Depuis six ans, je n'ai jamais payé pour un livre, ils étaient tous à ma portée. Le bonheur que ça m'a procuré est inquantifiable. Ce sentiment d'avoir ces littératures en abondance dans notre maison, ce sentiment d'être au moins choyés de ce côté, bordel, avec tous les sacrifices financiers que l'on doit faire depuis que...

Ce sentiment qui, chaque fois, me ramenait à notre première rencontre. Grâce à cette passion commune pour la bd (et le fait que l'on soit deux beautés supérieures!), X-Man et moi sommes devenus amoureux. Lire une bande dessinée apportée par X-Man me fait revenir 6 ans en arrière, me fait sentir gaga d'être aux côtés de ce représentant. Me rappelle ces jours où il venait me voir en librairie et où j'avais le ventre rempli de papillons... En plus d'avoir des étoiles dans les yeux dès qu'il franchissait la porte principale du magasin...

Je sais, je sais, rien ne sera effacé. Tout est en mouvement. L'amour évolue, prend une nouvelle forme et demeure au final bien présent, reste que j'étais rassurée de toujours pouvoir le mettre dans ce format de phylactère...

Je devrai désormais aller à la bibliothèque...

J'espère seulement que X-Man aura le temps de venir avec moi, parfois...



8 commentaires:

  1. J'aimerais trouver les bons mots, pour vous rassurer, pour te dire que je comprends dont lorsque tu dis que pourquoi tout ne peut pas toujours être beau, pour te dire que ta belle attitude ne vous amènera que du positif et qu'à lire la façon dont tu décris ton X-Man, je suis certaine qu'il trouvera un autre emploi, aussi stimulant et à la hauteur de ses qualités!
    Mais je pense que mes propos ne seront jamais à la hauteur de tes écrits, car même dans un billet tristounet, tu réussis à me surprendre!
    Je vais penser à votre famille et je suis certaine que tout se passera pour le mieux pour vous!

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  2. Je ne sais pas quoi te dire. Vraiment. Quand X-Man m'a appris la nouvelle, elle me semblait irréelle. Je trouvais ça tellement triste. Le pire, c'est que c'est lui qui tentait de me remonter le moral en me disant "Il ne faut pas que tu sois bouleversée. Je vais me trouver autre chose."

    Mais je présume que c'est ça, être un membre de la famille des super-héros, hein? Les super-héros, ils cherchent tous à consoler les autres alors que ce sont eux qui devraient être épaulés.

    Nous pensons à vous et nous sommes là pour vous.
    Bisous xx

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  3. Un pause! Un pause S.V.P.!!!

    Vous la méritez tellement...

    J'espère que ce sera effectivement une bonne chose. En fait, ça ne peut faire autrement.

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  4. Tu m'as fais pleurer Marie-Claude! T'as pas le droit!
    J'aimerais que l'on reste en contact en tout cas. Aline P.

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    1. Je ne voulais pas te faire pleurer... et j'avais oublié que tu lisais ce blogue... alors j'aurais pu y parler de toi et rien qu'en éloges, future ex-collègue de X-Man... On ne perdra pas contact, promis!!!

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  5. La vie c'est comme un grand souffle de vent, des fois, ce vent nous donne une grosse poussée vers l'avant, droit devant (non mais, je fais dans le vent-vant ce matin!) et alors, on s'accroche à notre cerf-volant(!), on s'appuie sur nos ailes, même si elles nous semblent lourdes au début, et puis tout à coup, on se met doucement à planer...
    Tu te souviens, quand on travaillait dans cet endroit où nous avions un gros rabais sur les livres, on se permettait des folies, et puis un jour, on ne peut plus, et c'est là que le monde de la bibliothèque municipale nous ouvre grand ses portes et là, y'a un autre petit bonheur qui s'installe!
    Alors, on a toujours nos vieux bouquins chéris d'avant, et tout ceux qui ne pèsent plus aussi lourds à déménager puisqu'on les rapporte régulièrement...
    Fais confiance ma grande, regarde aller ton mec qui semble avoir compris déjà cette opportunité de bon vent!!!
    BizouXXX

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    1. Ah ben là, Fée Rouk, tu viens de me faire penser que oui, si je déménage, ça fera moins de boîtes de livres!!! Quel casse-tête que de devoir élaguer encore et encore nos bibliothèques une ou deux fois par année! Tu vois, les hommes, on va les chercher avec la gourmandise, les femmes, avec le pratico-pratique! Hahahah!

      Merci pour ce vent de sagesse... il s'est rendu jusque chez nous et X-Boy accepte de partager!!!

      BizouXXXX

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  6. Ce que je retire de ton billet...;

    1- Tu as un mari très positif qui ne se laisse pas abattre par la vie et je crois que vous formez un couple exceptionnel à ce niveau. Bravo pour votre vision de la vie qui, malgré les tuiles, ne s'amenuise pas. D'autres auraient avantage à prendre exemple sur vous.

    2- Tu as encore une fois réalisé que tu aimais ton Homme plus que tout. C'est merveilleux de voir cela. Je vous souhaite tout le meilleur.

    :)

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