lundi 28 mai 2012

X-Y-Z-planète

Je me sens comme une météorite. Comme une boule de feu qu'on envoie dans un nouvel atmosphère, mais à qui on n'a pas si bien expliqué la trajectoire.

En effet, aujourd'hui, c'était le grand jour de l'évaluation de X-Boy afin de le classifier dans le "bon" groupe de prématernelle qui débutera en septembre. J'avais hâte à ce moment, hâte de laisser mon gamin dans les mains d'une prof (je ne suis pas sexiste, mais les profs mâles sont rares) et d'aller le récupérer ensuite. De voir sa réaction avec les autres enfants, de voir s'il se tournerait quand je reviendrais le chercher. Bref, de vivre une première expérience de mère-qui-amène-son-enfant-à-la-tite-école.

J'ai beau savoir que X-Boy ira dans cette école spécialisée, je ne saisis pas encore bien la réalité d'une telle école. Ayant travaillé dans plusieurs écoles primaires et ayant eu "accès" à des classes spécialisées, je n'avais pas idée de la surspécialisation à laquelle je serais exposée.

Quand nous sommes arrivés à l'école, nous avons été accueillis dans une grande salle de conférence. X-Boy était le seul en poussette, les autres enfants marchaient et parlaient. Je me suis demandée si j'étais au bon endroit? Mais oui, j'ai reconnu la douce directrice, qui nous a reconnu aussi. (Difficile d'oublier deux personnes aussi remarquables, hein! héhé)

Les éducatrices sont venues chercher les enfants, X-Boy a roulé jusqu'au local et la directrice nous a expliqué quelques détails. Entre autres, elle a mentionné le nombre record d'inscriptions pour la prématernelle cette année: 38 demandes. J'ai sursauté. J'ai été la seule à avoir cette réaction. La directrice m'a souri en coin. On avait l'air de se comprendre là-dessus. Elle a ensuite expliqué le processus de sélection, les critères auxquels les enfants doivent répondre pour être admis dans cette école. Elle a insisté sur la déficience intellectuelle, bien que celle-ci ne soit jamais diagnostiquée officiellement avant l'âge de 5 ou 6 ans. Elle a spécifié que si les enfants restaient ensuite pour la maternelle, ils devaient présenter d'autres spécificités afin de justifier la mise en place de services précis pour ces derniers.

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Je vais me permettre un commentaire plutôt cru et très direct. Lecteurs sensibles, payez-vous une pause de cette page et allez lire sur le conflit étudiant. C'est beaucoup plus jojo!

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En clair, ce que la directrice veut dire, c'est que si votre enfant est "normal" (ne me demandez pas la définition, mais utilisez votre connaissance générale et réaliste) mais qu'il a, par exemple, de la difficulté à prononcer ses "f" ou ses "r" et qu'un orthophoniste a dit qu'il avait un défaut de langage, CE N'EST PAS SUFFISANT pour qu'il fréquente une telle classe.

Pouvez-vous croire qu'il y a des parents qui souhaitent de tout coeur que leur enfant soit dans une école pour handicapés? Tout ça parce qu'ils craignent qu'à l'école régulière, leur petit chéri n'aura pas les services d'une orthophoniste? Ok, je SAIS que les ressources en ortho-ergo-psycho-etc dans les écoles sont LIMITÉES, que des enfants attendent des années avant d'avoir le soutien nécessaire et ça me donne envie de me faire aller la rôtissoire tous les soirs jusqu'à mes 80 ans afin de manifester contre l'absurdité de la gestion gouvernementale dans le dossier de l'éducation, mais quand même.

Un parent "normal" insiste pour que son enfant "normal" soit dans une telle classe? Avec des multi-handicapés, avec des enfants qui ne feront jamais la différence entre un chat et un chien? Vous croyez que ça va les aider? Que l'orthophoniste va lui accorder plus de temps? Nan. Elle ne lui accordera pas PLUS de temps, parce qu'elle en aura plein les baskets avec les enfants qui tentent, par un moyen autre que la parole, de communiquer leurs besoins vitaux. Elle n'en aura que faire d'un enfant qui dit "Fitre" au lieu de "Vitre", puisque son but premier sera d'établir une possibilité d'autonomie en communication pour des enfants qui sont RÉELLEMENT limités. Vous me direz que chaque enfant a besoin de soutien, j'en conviens. Mais il y a des parents qui n'ont qu'à arrêter de faire du yoga-bikram sur le plateau les mardis soirs et qu'ils s'assoient 20 minutes par jour avec leur bambin pour lui faire pratiquer les sons. Et s'ils peuvent se payer du bikram, qu'ils se payent de l'orthophonie privée, tiens. Quand on a un enfant handicapé, on n'a pas d'argent. Oh oui, on reçoit la fameuse rente du gouvernement, mais au final, sur votre rapport d'impôts, ce sera écrit 4 892$ pour la dernière année. Alors hein, le yoga-bikram ou les cours de salsa-néo-trash, je les ai dans le colimateur.

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Bref, ma tête a envie d'exploser d'incompréhension et de douleur. Oui, parce que ça m'a fait mal de voir les autres enfants, âgés entre 4 et 21 ans, dans leurs locaux ou dans le gymnase et la salle commune. Parce que dans ces murs, j'ai vu l'indescriptible. Des enfants aux jambes minces comme une ficelle qui tentaient de faire des pas dans une marchette aussi haute que moi. Des enfants sans mots, mais qui hurlent leur bonheur? Leur tristesse? Leur colère? Leur "rien? Qui hurlent le vide tout en le fixant. C'est venu me chercher, ces regards... ils regardent QUOI? Ils regardent OÙ? Ils semblent attendre... mais quoi ou qui? Et depuis combien de temps? Et pour combien de temps? Qu'est-ce qu'ils espèrent? À quoi rêvent-ils? Peuvent-ils rêver? Savent-ils où ils sont? Pourquoi ils sont là? Savent-ils que la vie prend son temps avec eux? Savent-ils que pour nous, tout va trop vite?

Ça déboule dans ma tête. J'ai failli éclater en sanglots devant ces deux ados bien installés dans leur fauteuil, à chaque extrémité de la salle. La tête retenue par des butés, des sangles aux torses, ils ont les membres sûrement paralysés et ils fixent les lumières au plafond. Ils ne bougent PAS. Ont-ils déjà bougé??? Bougeront-ils? Ça m'a rappelé la sublime chanson "Elle dort" de Francis Cabrel que je ne peux jamais écouter sans pleurer à chaudes larmes. J'ai eu envie de hurler après la vie, bordel! Pourquoi la vie permet-elle de telles choses? Comment survivent les parents de ses enfants? Avec qui faut-il coucher pour que ça arrête, la vie, de faire chier? Je peux-tu la régler, la dette de la société pour que ça arrête de hurler de noirceur dans ma tête quand je vois de tels enfants prisonniers de leur corps???

Je me considère vraiment chanceuse d'avoir un X-Boy qui se déplace et bouge plus que pas assez? Je ne savais plus. À cet instant où tous les autres parents marchaient vers le local d'accueil et où j'étais plantée au milieu de la salle commune à regarder autour de moi la vie tenter de trouver son sens, je ne savais plus rien. La seule envie que j'avais, c'était de serrer la main de ses deux ados et de ne plus la lâcher. De leur donner de l'amour (c'est quétaine, mais ha, j'assume) jusqu'à minuit ce soir. Jusqu'à demain si nécessaire. Et jusqu'à la fin des temps. J'avais envie de prendre tous ces enfants dans mes bras et de les serrer fort fort. Pour leur dire qu'ils sont là, qu'on les voit... même si ça nous fait mal de les voir. Mais que la seule solution, c'est de les embrasser, justement.

De se faire le visiteur privilégié de leur planète et d'y atterir notre navette quelques instants.

Je me suis sentie comme une météorite, maintenant je me sens comme une extra-terrestre.

Et je ne sais plus si je suis choyée d'avoir accès à cette planète. Cette planète a rouvert les valves du "pourquoi moi" et pour la refermer, ça prend le meilleur outil qui soit.

Je vais tout faire pour le trouver. Quitte à me brûler les yeux à les ouvrir ainsi.

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En rentrant à la maison, j'ai retrouvé X-Man qui venait de terminer le gazon. Il a lu dans mes yeux toutes ces lignes écrites. Il m'a ouvert les bras et j'ai éclaté de rire. Nerveux, le rire.

X-Man a admis que même s'il était en congé cet après-midi, il ne se sentait pas la force de voir cette autre réalité. Je l'ai aimé encore plus. Car il a eu l'honnêteté de me dire ses craintes et ça m'a confirmé que l'outil, il n'est pas si loin. Il est dans ma détermination à affronter, à chercher à comprendre. Et à le faire en sa compagnie. X-Man a cette force. Celle de m'écouter et d'être toujours là pour X-Boy et moi.

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mercredi 16 mai 2012

Cochez cette case.

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Avant tout, ça fait un bail (légal) que je n'ai mis les mains sur mon doux clavier afin de vous raconter les péripéties de X-Boy et cie. Les raisons: multiples. Bonnes ou mauvaises? C'est comme la météo, cela aura été, et restera, imprévisible. Je vous fais donc une rafale des dernières semaines, afin de me (vous) remettre à jour et de pouvoir recommencer à bloguer sans me sentir coincée dans le "fallait que t'écrives la suite, vilaine fille. Tu ne penses donc pas à tes lecteurs?". Oui, mais bon. Bon, oui mais. Ah et puis, bon. Allons.

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Pour ceux et celles qui ne connaissaient pas encore le verdict qui expliquait pourquoi X-Boy devenait Schtroumpf-Boy, je vous le donne sans préliminaires (quoique). X-Boy souffre d'épilepsie. Souffre est un mot fort. Puisque X-Boy, quand il revient de ses absences (X-Boy ne peut prendre votre appel pour l'instant. Veuillez raccrocher et rappeler plus tard), il est turbo-content. Oh que oui. Je vous dépeins une crise typique de Optiz-C:

Soudainement, votre enfant vous regarde et vous fixe. Mais attention, il ne se pâme pas devant vos beaux grands yeux. Non, il se prépare à visiter une contrée super-top marrante à laquelle vous n'aurez jamais accès, bandes d'ignares. Votre enfant vous fixe, mais ne vous regarde pas, donc. Ses lèvres deviennent mauves, puis bleues, puis son visage se crispe, devient bleu lui aussi. Et les yeux se lèvent au ciel, les iris tentent de rentrer sous les paupières, la tête devient lourde et tombe sur le côté. Tout ça durera entre 10 secondes et 4 minutes. Tout dépendra du spectacle d'humour neuronien. S'il est ultra-punché, votre enfant prendra son temps. Si c'est Pierre Légaré (L'égaré... elle était facile!), il reviendra vite. Pas plaisant de se retrouver avec plus "perdu" que soi!. Et ensuite, votre enfant retrouvera ses couleurs. Les lèvres redeviennent rouge vermeil, les joues rosissent, les yeux redeviennent clairs (ou foncés s'ils sont bruns, tsé) et pour couronner le tout, votre enfant vous regarde (pour vrai) et vous fait grâce du plus beau sourire sur terre. Accompagné d'un rire franc et d'une presque tape sur les cuisses, tellement c'est marrant de partir dans ses neurones.

Ce genre de crises d'épilepsie étant plutôt rares (comme un Opitz dans un jeu de quilles en plastique), voilà pourquoi les neurologues et les cardiologues se sont penchés mutuellement sur le cas de X-Boy dès son arrivée à l'hôpital. Chacun a fait sa batterie de tests (pendant que ça survoltait dans nos coeurs de parents) et au final: la neurologie a "gagné". Grande victoire pour X-Boy puisque valait mieux prendre des penules pour contrôler l'épilepsie (si étrange soit-elle) que de se faire ouvrir le coeur et risquer d'y rester... Ouf-e.

Néanmoins, X-Boy a dû rester 8 jours à l'hôpital.

Rafale d'hôpital:

- Avoir des co-chambreurs, c'est juste cool quand on part en appartement à 16 ou 17 ans. (Quand t'as presque 4 ans et que c'est ta mère qui se tape les crises de ton coloc du même âge, jour et nuit, ce n'est PAS cool, ok.)

- Avoir une gang de résidents qui accompagnent la pédiatre en chef, ça relève de la caricature. Les jeunes sont là, la bouche grand ouverte, à regarder votre enfant se faire virer dans tous les sens (et hop, regardez ici, il n'y a pas de testicules (OOOH!), et hop, regardez là comme il n'a pas de tonus dans les cuisses (je te verrais, moi, avec de l'Ativan plein le sang, avoir du tonus dans les cuisses!) et se faire examiner sous toutes les coutures. Et ce, au-travers des barreaux de la cage... euh, s'cusez, de la bassinette. Assister à "cette évaluation" m'a fait en rire jusqu'aux petites heures avec la "mère-d'à-côté" qui a vécu la même histoire avec son fils, atteint du Kawasaki. (Les résidents en ont eu pour leur argent, frais de scolarité à la hausse ou non!). UN OPITZ-C ET UN KAWASAKI DANS LA MÊME CHAMBRE??? MAIS QUELLE AUBAINE!!!

- Attachez donc vos chiens. Parce qu'à cause d'un clébard de grande taille, X-Man est arrivé avec deux heures de retard le premier matin de l'hospitalisation. "Ben oui X-Mom.. tu ne me croiras pas, mais il y avait un chien sur Décarie et la police avait fermé la route pour pouvoir l'attraper. Ça a causé un bouchon monstre." Je la ris encore. (Et j'ai vérifé le fait. X-Man n'a pas de maîtresse. Comparativement au chien qui DEVRAIT en avoir eu une ce matin-là. Rhâââ)

- Si vous avez d'autres enfants à la maison et que vous co-chambrez avec un enfant (Opitz-C ou non) à la santé fragile, svp, avisez le personnel hospitalier qu'à la maison, ça dégueule et ça chie mou et vert. PARCE QUE TOUT LE MONDE IL VA LA POGNER, LEUR MAUDITE GASTRO OK!!! *Fait vérifié et désapprouvé. X-Boy l'a eu, je l'ai eue et X-Man aussi. On avait VRAIMENT envie (rhôôô) d'attraper cette saleté tandis que fiston faisait des crises d'épilepsie aux trois minutes (sans blague) pendant plus de quatre jours durant lesquels on n'avait pas réussi à fermer l'oeil en tant que parents exemplaires? Faut croire que oui. Et que les infirmières aussi. Fallait voir le manque de personnel jusqu'à notre départ... Yé.*

- S'il vous prend une soudaine envie de manger du bacon tôt le matin et que vous trouvez ça bon... avisez vos proches que vous n'allez vraiment pas bien. Le matin où cette envie "carnée" m'est tombée dessus, je m'interrogeais fortement à savoir si j'étais enceinte ou quoi? Enceinte oui: d'une gastro en gestation qui s'est pointée le soir même. Méfiez-vous donc des envies de bouffe qui d'ordinaire, ne vous interpelle nullement. (La mère-d'à-côté avait eu, elle aussi, ce matin-là, envie d'un sandwich aux saucisses... et elle a donné naissance à la gastro en même temps que moi!)

- Si vous avez la gastro pendant que votre fils est hospitalisé et que vous avez un amoureux-phobique-de-ladite-maladie, prémunissez-vous d'une réserve de nerfs d'acier. ET de renfort. Prévoyez que vous devrez abdiquer (malgré la colère, la honte de laisser votre enfant "là" et la tristesse de vous retrouver dans un si lamentable état physique et mental) et DEMANDEZ de l'aide à vos proches. Ne négligez pas le potentiel "maman" de votre propre mère, de votre belle-mère et de vos amis. Acceptez de rentrer à la maison et de r-é-c-u-p-é-r-e-r. Et dormez, seigneur dieu. (tout en priant St-quelque-chose de faire en sorte que X-Man survive à la gastro qu'il choppera dès que vous rentrerez tous à la maison... un homme malade, c'est une bombe nucléaire en dormance! Et quand ça "pète"... hahahha)

- Attendez-vous à ce que, lorsque ce sera votre mère qui prendra le relais pour la nuit, tout soit chamboulé et compliqué. En effet, ma mère, qui se reposait tranquillement dans le confortable lit de non-fortune auprès d'un X-Boy enfin endormi, a vu sa nuit de faire anihiler par la rentrée "urgente" d'un autre enfant dans le lit désormais libre du Kawasaki. Ainsi, à 1h00 du matin, ça hurlait, pleurait, posait 1001 questions, pitonnait sur des moniteurs, branchait-piquait-fatigait-le-bébé sans se "souvenir" qu'à côté, il y avait un enfant nouvellement épileptique qui en avait bavé pour sa part ces derniers temps. Qui plus est, ma mère comprendra à travers les branches du rideau-mur que ledit nouvel enfant a une maladie infectieuse contagieuse (!!!) et que OH, il faudrait changer X-Boy de chambre là là. Ben oui, quelle bonne idée. Ainsi, votre mère, à 3h00 du matin, déménagera ses (et vos) pénates dans une luxueuse chambre à 4 enfants. Plus 4 parents. Ce qui fait un total de 4 hurleurs nocturnes plus une possibilité d'au moins 2 ronfleurs qui n'entendent pas, eux, leur enfant hurler ni la saprée machine à saturation d'oxygène qui se débranche toute la nuit. Bref, votre mère ne dormira PAS. Mais trouvera le moyen de rigoler au petit matin, parce qu'elle est comme vous, elle a un sens de l'humour à tout casser. (Sauf les bonnes gueules!)

- Préparez-vous à revenir à l'hôpital et à ne pas vous en sentir capable, puisque malgré votre forte détermination, après une journée à la maison, votre gastro n'est PAS terminée. Dès votre rentrée dans cet hôtel du virus amical, vous aurez le vertige, la nausée, le mal de ventre immédiat et cette envie de tout détruire sur votre passage. Y compris le personnel qui vous apparaîtra soudainement comme étant d'une incompétence telle... alors que deux jours avant, vous les trouviez charmants. Mettez votre orgueil de côté, votre colère dans vos poches, ravalez le motton d'injustice qui vous donne envie de hurler et acceptez l'aide de vos amis qui prennent le "relais" en attendant que votre belle-mère vienne aussi profiter d'une nuit gratuite au paradis de dodo-non-réparateur. Quittez l'hôpital en maudissant la vie et en convainquant X-Man que les gargouillis dans son ventre ne sont que les résultats du stress. (pffff)

- Quand on vous annoncera que votre enfant peut quitter l'hôpital, prévoyez un bon quatre heures d'attente insupportable dans votre cagibi aux murs dépeints. En effet, c'est donc looooong de remplir des prescriptions et de vous les donner. Surtout si la pharmacie est dans le MÊME établissement, les procédures n'en seront que plus longues. Prenez bien note qu'il sera plus avantageux de "demander les papiers et de les donner vous-mêmes à VOTRE pharmacien" que de les laisser dans les mains des "pros". Vérifié et approuvé. On a sauvé deux heures d'attente. Ouf-e.

- Quand vous rentrerez à la maison avec votre enfant épileptique, préparez-vous au choc de la solitude. Du questionnement et de la surveillance perpétuel. "Est-il correct? Ses lèvres sont-elles bleues? Respire-t-il? Dort-il? Est-il en vie? Et s'il faisait un crise cette nuit? Et si les médicaments ne sont pas les bons? Et surtout, s'il fallait retourner à l'hôpital demain, comment va-t-on faire???" Bref, préparez-vous à paranoïer, à encore moins dormir parce que trop de silence tout à coup dans votre maison, à n'être plus capable de manger de peur d'être malade à nouveau. Bref, préparez-vous à l'angoisse. Même si vous croyiez y être habitués. Elle sera plus poignante et dérangeante. Jusqu'à ce que vous lâchiez prise et que vous compreniez que hey, chose, tout le monde peut mourir dans son sommeil, épileptique ou non. Alors dors, bordel, parce que la vie continue. Et si tu continues à angoisser ainsi, tu feras un infarctus à 40 ans et ça sera bien utile, hein? Non.

- Préparez-vous à avoir moins de temps pour bloguer.

Hahahah. (C'est drôle, ça? Non. Mais vaut mieux en rire: c'est devenu votre nouvelle philosophie.)

"Nouvelle" philosophie. Non... On vous a souvent répété que c'est ainsi que vous passez "au travers".

Mais ça, vous l'oubliez souvent. Car vous croyez toujours que rien de pire n'arrivera.

Et puis, un jour, vous devrez cocher une nouvelle case dans les formulaires médicaux.

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Épilepsie: check.

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Gestionnaire de penules: check.

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Folle du logis: nan. Pas encore, la la lère. 

mardi 1 mai 2012

Schtroumpfboy Partie 3!

Pas déjà vous dites-vous? Ben moi aussi, je me dis ça. Le rêve d'une blogueuse-mère-thérapeute-en-son-genre? Avoir DU TEMPS SEULE et surtout, avoir de l'énergie pour écrire d'un trait... sans devoir m'arrêter toutes les 46 secondes pour causes multiples et multiples causes.

***

X-Boy est arrivé à Ste-Justine, donc, en fin d'après-midi. À l'urgence, on nous a accueilli rapidement et très professionnellement. En moins d'une heure, on était installé dans une chambre "d'attente" avant d'être transféré au 6e en pédiatrie dans la soirée. Ce qui fait qu'à 18h00, j'ai diné. Oui oui... car ce midi-là, au lieu de me goinfrer dans un quelconque repas du samedi, j'étais dans une salle d'attente de clinique à réanimer mon fiston. Allez savoir, on fait des choix étranges dans une vie, hein?

Ce préambule étant écrit (ai-je réussi à m'asseoir pour écrire plus qu'une minute?!? Oui!!!!!!!!! Allez, on applaudit la petite victoire de la semaine!), je peux me concentrer sur

La Formidable aventure de Schtoumpf-Boy au Pays de Ste-Justine (musique mélodramatique)

Chambre 6318. La préposée ouvre la porte, fait rouler X-Boy dans sa bassinette de luxe (aux urgences, on a de la classe) et le transfère dans une bassinette désuette en métal lette et aux barreaux frettes. (Rimes en "ettes", cochez ici) En se rendant à la bassinette-lette, on passe devant une mère (asiatique) qui tient son gamin-hurleur et parle tout bas à son mari (égyptien, on suppose) qui lui, nous dit d'une voix très douce: "il n'y a rien de plus injuste qu'un enfant malade". Ce à quoi ni X-Man ni moi avons répliqué à la blague, comme nous l'aurions fait d'habitude... étant des habitués de l'ironie en situation d'urgence. Non, cette fois-ci, le climat était à la sériosité et l'injustice criait et hurlait dans tous les corridors.

Une infirmière vient se présenter, prend les signes vitaux de X-Boy et nous pouvons lui montrer, en quelques minutes, plusieurs épisodes de lèvres bleues qui lui font appeler d'urgence la pédiatre de l'étage. Celle-ci n'étant plus là à cette heure, on nous envoie un résident qui observe attentivement X-Boy alors qu'on lui donne le masque à oxygène et il demande qu'on lui redonne de l'Ativan afin de le stabiliser à nouveau. L'infirmière commande le médicament, le résident nous interroge à nouveau et en vient aux suppositions suivantes: X-Boy fait des convulsions, ce qui pourrait indiquer qu'il fait de l'épilepsie (musique dramatique), mais ce qui est étrange, c'est qu'il devienne bleu et qu'il cesse aussi souvent de respirer, ce qui pourrait indiquer un problème cardiaque (musique plus dramatique).

- ??? et pour cette nuit.. il se passe quoi, dirent des parents ultra-inquiets.

- Il sera stable pour cette nuit. Avec l'Ativan, il va être "amoché" un peu et il dormira sûrement par vagues. Probablement qu'il va pleurer beaucoup et sera irritable. Mais dès demain matin, la neurologue et la cardiologue vont venir vous voir afin de pouvoir tirer une conclusion. Pour la nuit, les infirmières sont là et elles passeront aux heures afin de s'assurer qu'il sera bien. Vous savez, si c'est de l'épilepsie, il pourra faire plusieurs crises pendant la nuit et vous ne pourrez pas le savoir, puisque vous dormirez.

- Vous croyez que je vais dormir en me disant ça?!? (Je répondais au "je" car c'est moi la grande chanceuse qui dort à l'hôpital avec le petit)

- ...

- X-Mom blague, Docteur.. elle a un grand sens de l'humour...

- Ah non, X-Man. Je ne blague pas. Déjà que je ne dormais que d'un oeil plusieurs nuits pas mois avec toutes les bebittes que X-Boy a attrapées, maintenant,  je me prends un abonnement à du speed-intra-veineux pour le veiller, oui!!! Pas question que je le laisse faire des crises toute la nuit!!!

- X-Mom... il faut comprendre que les crises de X-Boy, s'il s'agit d'épilepsie, car rien n'est confirmé, ne sont pas graves... En ce sens qu'elles sont plutôt des absences et qu'il en revient en riant, comme je l'ai vu tantôt. Bon, ce n'est pas parce que c'est amusant pour lui d'avoir des absences, mais ça ne semble pas l'épuiser comme le font les grandes crises d'épilepsie. Il ne peut pas manquer d'oxygène, il est branché et les infirmières seront là. Sérieusement, vous pouvez et vous devez essayer de dormir. Pour être en forme pour les jours qui suivront...

- Mmm. Vous avez raison, probablement. Ce n'est juste pas très évident d'accepter que mon fils ne sera pas "bien" plusieurs fois dans la nuit... et que je ne peux rien faire pour l'aider.

- En effet. Bon, j'ai pris toutes les notes nécessaires pour faire un rapport à la pédiatre, je vous quitte et je vais voir les autres patients de l'étage. S'il y a quoi que ce soit qui vous inquiète, vous sonnez ici sur le bouton rouge et on viendra vous voir. Ça va aller?

- Mmm.

Le résident est parti, X-Man m'a pris dans ses bras. Le bal des questions existentielles a commencé. Et si c'est de l'épilepsie? Et si c'est le coeur? Et si c'est pire que le coeur et l'épilepsie? Et si c'est un cancer du cerveau? Et s'il ne se réveillait pas demain et que je ne m'en aperçois pas? Et si moi, (X-Man), je ne suis pas ici cette nuit et que ça tourne mal, je ne m'en remettrai pas... Et si les étudiants bloquent le pont demain matin, je peux avoir le numéro d'une hélicoptère?!?

On en était là de nos réflexions toutes plus utiles les unes que les autres quand dans la bassinette-lette d'à côté, le petit recommence à hurler. L'infirmière arrive à son chevet et les deux parents discutent calmement, mais nerveusement. C'est alors qu'on entend le mot "contagion" et "accès contrôlé à la chambre" et que nous arrêtons de respirer. La mère du petit demande des explications claires:

- Mais à l'urgence, on nous a assuré que ce n'est nullement contagieux et là, vous nous mettez en isolement? Qu'est-ce que ça veut dire? On a deux autres enfants à la maison, Madame...

- Non non non, ils se sont trompés dans les cas d'isolement. Votre fils n'est nullement contagieux. Mais nous devons attendre demain que la pédiatre confirme que la contagion est nulle avant de retirer l'affiche que l'on vient d'installer dans votre porte de chambre.

- D'accord. Merci.

L'infirmière est repartie et je ne pouvais pas respirer très bien sur le coup. Tout bas à X-Man:

- Qu'est-ce que c'est que cette histoire de confusion? Et de contagion? C'est quoi l'affaire-là, hein? On nous fout dans une chambre avec un enfant contagieux sans nous en aviser? C'est supposé d'être drôle comme erreur, ça? Et c'est quoi, sa maladie au petit, hein? On va tous l'attraper et en crever tant qu'à y être? Bravo bravo l'équipe de soir... je vous décerne un prix, là!!!

- X-Mom.. calme-toi. On va sûrement nous rassurer.

J'ai pesé sur le bouton rouge. Panique de mère oblige.

L'infirmière est arrivée tout de go.

- Madame L'Infirmière... Vous pouvez nous dire si oui ou non, le petit garçon dans le lit d'à côté... qui est séparé du mien par un mince rideau décoratif, est contagieux? Parce que ce n'est comme pas la joie d'apprendre ça à cette minute précise de la journée...

- Non non non, X-Mom. Il y a vraiment eu une erreur d'affichage. Le petit garçon a un virus très rare qui ne s'attrape pas.

- Mais c'est un virus. Et qui dit virus dit: s'attrape, non?

- Oui, mais non. Il a eu un virus au départ qui s'est transformée en cette maladie. Une très mauvaise transformation, quoi.

- Mmm. Je comprends. Mais vous êtes sûre que X-Boy n'est pas en danger?

- Oui X-Mom, vous pouvez dormir tranquille.

- Mmm. Merci.

***

Bon là, j'ai eu envie de péter une coche sur la réplique "dormir tranquille". Ça ne calmera jamais une mère dans un hôpital, franchement. Autant lui dire qu'en ce moment, elle a un teint de pêche et des cheveux resplendissants. De la crédibilité pure. Ouh là.

***

Le père du petit co-chambreur s'est adressé à nous. (Il écoute aux rideaux!?! Tsss... comme si on faisait ça, nous!!!)

- Bonsoir... vous avez raison d'avoir eu peur. Mais je vous assure que ce n'est pas contagieux. Notre fils a la maladie de Kawasaki. C'est très très rare... et très dangereux. Ça attaque directement le coeur et ça peut causer un arrêt cardiaque.

- Kawasaki? (Je n'ai pu m'empêcher...) Comme la moto?

- Oui oui.. comme la moto. Étrange nom, hein?

- En effet. Mais le nôtre il a le syndrome de Opitz-C. Mais ce n'est pas une marque de voiture. Hahaha.

On a tous ri. Je ne pourrais dire si c'était un rire sincère, nerveux ou fataliste. Dans la même chambre de cet hôpital, se trouvaient deux oisillons rares.

Et à leurs côtés, des parents nerveux comme des poules pas de tête.

Bref, c'était un peu la basse-cour dans cette pièce exigue, où de surcroît, il fallait veiller fort au grain.

***

C'est pas vrai que je fais du jeu sémantique de poulailler!!! Vous savez ce que ça veut dire?

Va te coucher, X-Mom.

Avant que le coq ne chante trois fois...

Doux Jésus.. je fais dans la parabole biblique?

Cela fera. On se retrouve dans... aucune idée.

Mais on se retrouvera.

***